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Mesdames et Messieurs les
élus
Et singulièrement
Monsieur Jean-Claude Leroy,
Président du Conseil départemental du
Pas-de-Calais ;
Madame Sandrine Merlo, maire
de Wismes ;
Mesdames et messieurs les
représentants des corps constitués, en vos
grades et qualités ;
Légionnaires et Compagnons de
l’Ordre National du Mérite ;
Mesdames et messieurs les
présidents ou représentants des associations
patriotiques
Et singulièrement
Monsieur Jean-Pierre Dumont,
président départemental de l’ANMONM62
Monsieur Jean-Claude Delpouve,
président de la section audomaroise de la
médaille militaire
Monsieur Serge Vanhoutte,
président de la section boulonnaise du
Souvenir Français
Madame léonie Konieczka,
ancienne déporté représentant l’ONAC
Mesdames et Messieurs les
porte-drapeau
Mesdames, Messieurs.
Au seuil de l’année 1908, un
jeune homme qui n’avait pas encore dix-huit
ans songeant à la mort écrivait ces vers :
« Quand je devrai
mourir,...
J’aimerais que ce soit le
soir. / Le jour mourant
Donne à celui qui part un
regret moins pesant
Et lui fait un linceul de
voiles ;/
Le soir !.../ Avec la nuit
la paix viendrait des cieux/
Et j’aurais en mourant
dans le cœur et les yeux
Le calme apaisant des
étoiles./
J’aimerais que ce soit,/
pour mourir sans regret,/
Un soir / où je verrais la
Gloire à mon chevet
Me montrer la Patrie en
fête,/
Un soir où je pourrais,/
écrasé sous l’effort,/
Sentir passer
avec le frisson de la Mort/
Son baiser brûlant sur ma
tête. »
Le neuf novembre mille neuf
cent soixante dix, en début de soirée comme
il l’avait souhaité dans ce poème écrit
soixante deux ans plus tôt, Charles De
Gaulle, s’écroulait dans son fauteuil. André
Malraux allait trouver les mots justes pour
un ultime hommage à celui qui restera pour
l’Histoire l’Homme du 18 juin :
« … Seul à Colombey, comme
les Grands Maîtres des Chevaliers de
Palestine devant leur cercueil, il est
encore le Grand Maître de l’Ordre de la
France, parce qu’il l’a assumée… ».
Mesdames, Messieurs,
nous sommes réunis aujourd’hui, en ce 9
novembre 2025, pour rendre un hommage
solennel à une figure exceptionnelle de
notre histoire : le général Charles de
Gaulle. Il y a 55 ans, la France perdait
avec lui un homme dont le destin s’est bien
souvent confondu avec celui de la nation.
Soldat, résistant, fondateur de la Ve
République, il a incarné, à chaque étape de
sa vie, les valeurs qui font et ont fait la
grandeur de notre pays : le courage, la
détermination, l’indépendance et l’amour de
la patrie.
Il est impossible d'évoquer
de Gaulle sans immédiatement penser à
l'Appel du 18 juin 1940. Face à
l'effondrement, à la déroute, il fut la voix
de la résistance, le refus de la fatalité
qui permit à la France de rester dans le
combat. Cet acte d'une audace et d'une
solitude immenses a sauvé l'honneur de la
Nation, a posé les fondations de la France
Libre , a fondé la Résistance, un mouvement
qui a uni des femmes et des hommes de toutes
origines dans un même combat pour la
liberté… Il nous rappelle que même dans les
heures les plus sombres, l'esprit de
résistance et la foi en la France ne doivent
jamais s'éteindre.
Ce jour est pour nous
l’occasion de rendre hommage à celui qui
incarna, pendant les heures les plus sombres
comme dans les moments de reconstruction,
l’âme et la grandeur de notre pays. Soldat,
résistant, chef d’État, le Général de Gaulle
fut avant tout un homme de devoir, un homme
de parole, un homme de France.
Mais au-delà de ses
réalisations politiques et militaires, c’est
de l’homme du Nord dont je vous propose de
nous souvenir un instant. Un homme qui
aimait la France plus que tout, mais qui,
toute sa vie, garda une
relation particulière avec sa région
d’origine.
Car en fait, si les de Gaulle
habitaient Paris, ils restaient néanmoins
très attachés au Nord : en accord avec la
tradition de la famille Maillot, la mère du
Général se rendit à Lille pour donner
naissance à son fils : Charles de Gaulle
qui, à la première page de ses Mémoires, se
présente comme un "petit Lillois de Paris".
De fait, "le petit Lillois de Paris",
retournait très fréquemment à Lille, ne
fût-ce que pendant les vacances, à
l'occasion des fêtes, le dimanche parfois,
et toujours lors de la foire ainsi qu'à la
Saint-Nicolas. C'est cette Saint-Nicolas -
et les cadeaux offerts aux enfants le 6
décembre - qui a contribué à renforcer le
sentiment d’appartenance nordiste des De
Gaulle. Les cousins, oncles et tantes
Maillot et de Corbie se réunissaient lors de
ces occasions au 9 de la rue Princesse. Pour
Charles de Gaulle, la maison natale est
toujours restée très présente dans ses
souvenirs.
"Avec l'âge, confia-t-il à l'un de ses
proches, ce sont les souvenirs d'enfance qui
prédominent…ceux de la rue princesse à
Lille, où, je suis né ».
D'autres lieux de la région
Nord étaient très appréciés par Charles de
Gaulle, en particulier les plages du
Pas-de-Calais à Wimille et Wimereux . Sa
famille séjournait notamment à la villa
Saint-Patrick construite vers 1900 par Jules
et Lucie Maillot, où Charles jouait avec ses
cousins et cousines, pendant les vacances
d'été. Après son mariage, Charles de Gaulle
va deux ans de suite passer ses vacances à
Wissant, C’est là qu’inspiré par le paysage,
il écrivit une grande partie de son premier
ouvrage : Le fil de l’Épée.
« J’ai toujours
aimé l’immensité de la mer… confie-t-il, Il
me semble que ma pensée se développe mieux
quand mon horizon n’est pas bouché ! ».
Jusqu’à la fin de sa vie, lors de
chacun des séjours familiaux à Calais, de
Gaulle ira marcher sur les plages entre
Sangatte et le Cap Blanc-Nez, entre Wissant
et le Cap Gris-Nez.
Arras, où il effectua son
service militaire en 1909 au 33ème
régiment d’infanterie, avant d’entrer
à Saint-Cyr et d’y revenir en 1912 avec le
grade de sous-lieutenant pour y rester 2 ans
jusqu’à la déclaration de la guerre 14 ;
Calais, où quelques années
plus tard, en avril 1921,il se maria avec
Yvonne Vendroux, ont profondément marqués
l’enracinement nordiste du Général.
À Wismes, le
Général de Gaule, avait des attaches
familiales qu’il a tenu à cultiver de
manière durable. Durant la Première Guerre
mondiale, la mère de Charles de Gaulle
s’était réfugiée dans ce petit village,
auprès de sa sœur Noémie et de son
beau-frère Gustave de Corbie, par ailleurs
parrain du général. Celui-ci, dans sa
jeunesse, est venu à plusieurs reprises en
vacances à Wismes où il eût l’occasion de se
mesurer lors de matchs de football aux
jeunes de la commune. D’ailleurs en mars
1924, le général en devenant le parrain
d’Odile de Corbie, seconde fille de son
cousin Jean, continua par la suite d’avoir
une relation suivie avec l’ensemble des
membres de la famille. C’est en Avril 1947
que le Général est revenu à Wismes pour la
dernière fois à l’occasion de l’enterrement
de son parrain et qu’il a mangé le
pot-au-feu à l’auberge du village.
Beaucoup de ses proches ont
rapporté combien il aimait rappeler y avoir
passé des jours heureux. Et c’était
assurément plus qu’une simple politesse à
l’égard de ses interlocuteurs.
Entre Charles de Gaulle et
son Nord natal, la connivence était
naturelle, profonde, alimentée par des
sentiments, des réflexes communs. Lors d'une
émission radiophonique, en 1982, l'amiral
Philippe de Gaulle a bien montré que, pour
son père, "le
Nord représentait non seulement un lieu de
naissance [...] mais aussi une éthique, un
mode d'éducation, une manière de voir,
une discrétion dans l'expression des
sentiments, une pudeur, une apparente
froideur, une certaine manière de "ne pas
faire d'histoires". Le Général
lui-même, au cours de sa première visite
officielle à Lille, le 30 septembre 1944, le
déclarera à l'immense foule qui était en
profonde communion avec lui : «
La voilà donc libérée, la chère, la vieille
ville de Lille, la voilà sortie de l'océan
de souffrances et d'humiliations où elle a
été plongée, sans avoir jamais rien perdu de
sa fierté et de sa dignité, sans avoir
jamais failli à l'espérance !".
"Nous autres, Lillois, ce
sont les vérités que nous regardons en face,
beaucoup plus que nous ne goûtons les
formules."
L'homme de
Gaulle, le soldat de Gaulle a toujours
apprécié les hommes et les femmes du Nord,
ses frères et sœurs en courage. Un historien
croit même pouvoir suggérer que lorsque le
Général grommelait
"les Français
sont des veaux !",
il en exceptait implicitement les
gens du Nord.
Tout
naturellement, c'est dans l'épreuve
renouvelée, celle du sang, des larmes, de la
guerre, que les liens existentiels qui
unissaient Charles de Gaulle à sa terre
natale se sont manifestés le plus fortement.
Le 29 juin 1947, à l'hippodrome des Flandres
à Marcq-en Barœul, le Général déclarera à
ses compatriotes :
"Nous autres
gens du Nord, sommes fiers que les hommes et
les femmes de chez nous aient, en très grand
nombre et comme toujours, bien servi la
Patrie dans le drame où s'est joué son
destin. »
Le Général de Gaulle nous a
quitté, mais son héritage est toujours
vivant. Il vit dans nos institutions, dans
notre indépendance nationale, dans notre
attachement à la liberté et à la justice. Il
vit aussi dans la mémoire collective de
notre peuple, qui n’oublie pas ceux qui
l’ont servi avec abnégation.
Aujourd'hui, alors que le
monde traverse de nouvelles épreuves,
l'exemple gaullien garde toute sa force. Il
nous rappelle qu'un peuple qui croit en
lui-même, peut surmonter tous les défis,
qu'une nation unie autour de ses valeurs
peut peser sur le cours de l'histoire.
Rendons hommage à celui qui,
par ses écrits comme par ses actes, a montré
que la politique peut être un art noble au
service de la grandeur collective.
Perpétuons sa mémoire en cultivant les
vertus qu'il incarnait : le courage, la
lucidité, le sens de l'État et l'amour de la
France.
9 novembre 2025.
Jean-Pierre Delattre.
Chevalier de l’Ordre National
du mérite.
Vice-président départemental
de l’Association Nationale
des Membres de l’Ordre National du Mérite,
responsable du secteur
Morinie Côte d’Opale.
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